FCNantais : Vous avez récemment déclaré dans « Ouest-France » : « mon souhait, irréalisable, est que le club qui s'entraîne à la Jonelière ne s'appelle plus le Football Club de Nantes ». Vous pourriez développer ? Guy Hillion : C'était une boutade. Mais je suis tellement déçu du jeu pratiqué, de la valeur de certains joueurs qu'on est loin du nom que représente le FC Nantes. Il ne reste plus que le maillot. Le jeu, en revanche, n'a plus aucun rapport. Ce n'est plus le FC Nantes, c'est clair. Toutes ces prestations sont très loin du football qui nous a donné tant de bonheur. Vous croyez qu'on reverra un jour le vrai FC Nantes ? Je ne sais pas. J'ai beaucoup de doutes. Ce n'est donc pas possible avec l'équipe dirigeante actuelle ? Je ne connais pas le fonctionnement des gens qui sont en place actuellement Eux semblent vous connaître : Larièpe a déclaré qu'il avait parlé avec vous de formation C'est faux, on n'a jamais évoqué ensemble le problème de la formation nantaise. Son procédé est inélégant alors ? Je ne sais pas. J'ignore pourquoi il a dit cela Peut-être pour se donner un peu de crédibilité ? Je ne fais pas d'hypothèse. Pour que le FC Nantes redevienne ce qu'il fut, il faudrait une autre équipe dirigeante ? L'important, c'est le staff technique, à condition évidemment qu'on le laisse développer ses idées. Les membres de la direction doivent savoir rester à leurs places, dans les protocolaires. Et le staff technique actuel ne peut pas faire jouer son équipe à la nantaise ? Bien sûr que non ! Le jeu à la nantaise ne s'invente pas, il faut en être imprégné, l'avoir pratiqué et assimilé. On peut avoir vu et regarder Nantes jouer durant sa période faste, en matches ou à la télé, mais c'est un jeu qui demande tellement d'intelligence et de subtilités qu'on ne peut pas l'inventer. Je connais trois entraîneurs qui peuvent faire jouer à la nantaise et apprendre ce football si particulier à leurs joueurs. Ce sont Jean-Claude Suaudeau, Raynald Denoueix et Loïc Amisse. Trois techniciens élevés dans le culte du jeu à la nantaise. Que pensez-vous d'Elie Baup ? Je n'en pense rien de particulier. Quand vous voyez le FC Nantes actuel... J'ai mal au coeur ! Quand on a aimé ce club et encore plus quand on y a travaillé, on est marqué à vie. Quand je parle de Nantes, du jeu qui était le sien, j'ai encore la chair de poule. Mais il y a sept-huit ans que le phénomène de destruction est enclenché Même avant. La clef, c'est en premier le départ de Coco Suaudeau qui aurait pu rester avec Raynald Denoueix quand il a décidé de se retirer de l'équipe. Rester pour encadrer les équipes de jeunes et former les entraîneurs comme il en avait été question à l'époque du président Jean-René Toumelin. Ensuite, le départ de Raynald Denoueix a mis fin au jeu à la nantaise. L'arrivée de Loïc Amisse a été très mal préparée. De votre long passage au FC Nantes, quels sont les souvenirs qui vous reviennent en priorité ? Des souvenirs de vie, des souvenirs de jeu, des souvenirs de matches. Quand on se réunissait le matin autour de la machine à café, avec Jean-Claude Suaudeau, Raynald Denoueix et les entraîneurs. Lorsqu'ils prenaient la parole, c'était fabuleux et sans fin. Les matches, c'est la Beaujoire et même Saupin. Des Nantes – Saint-Etienne, un match contre Montpellier que nous avions gagné 6-0 en 1992, les victoires en finale de Coupe de France avec Raynald. Comment ne pas frémir quand on repense à la qualité de jeu que Nantes était capable de développer. Mais il n'y avait pas que l'équipe première. Voir les jeunes, c'était aussi un immense plaisir. Je n'ai pas oublié une équipe de Cadets Nationaux de Jean-Claude Baudoin, quel jeu ! Et puis l'équipe qui est allé en finale de Gambardella contre Montpellier, en 1996. Neuf joueurs ont ensuite signé pro ! Alors, on ne reverra jamais cela ? Je le répète : je ne sais pas. Il ne faut jamais dire jamais. Mais dans le contexte actuel, c'est impossible, c'est clair. Il y aura peut-être des résultats mais le jeu à la nantaise ne peut plus exister, sans être impulsé par un entraîneur du cru. Ça ne s'invente pas. Vous travaillez toujours pour Chelsea, êtes-vous heureux ? C'est ma troisième saison, je suis reparti avec un contrat CDI. Je suis chargé de détecter les joueurs professionnels et jeunes sur toute la France. Chelsea est un super club, je bénéficie d'une grande liberté d'action, je trouve toujours des interlocuteurs disponibles et prompts à agir. Dans l'équipe réserve de Chelsea, il y a en ce moment des jeunes de très grande valeur, on parlera vite d'eux. Avez-vous des noms ? J'en ai fait signer deux sur qui on fonde vraiment beaucoup d'espoirs. Il y a le Lensois Gaël Kakuta, qui est né en 1991. Il vient de parapher son premier contrat pro. Et puis Jérémy Boga, qui évoluait à l'ASPTT Marseille. Il est plus jeune : né en 1995 et pour l'instant il est au centre de pré-formation. Au fait, vous possédiez des actions du FC Nantes et elles vous donnaient droit d'accès aux assemblées générales... Je les ai toujours. Je ne suis plus allé aux assemblées générales depuis plusieurs années. Un jour, il faudra que j'y remette les pieds. Ce devrait être marrant... Marrant ou triste ? Je me pose la question. Recueilli par B.V., le 15 octobre 2008
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