L'un, Vladimir Stojkovoc, a 23 ans et il a été présenté par les dirigeants nantais, comme un grand espoir à son poste, quasiment une valeur sûre. Il évoluait à l'Etoile Rouge de Belgrade dont le niveau ne vole plus très haut depuis longtemps. Il est aux portes de l'équipe nationale serbe mais on ignore s'il s'agit d'une grosse référence tant cette formation est limitée, sa présence au dernier Mondial ayant été essentiellement folklorique (après tout, le Togo y était, lui-aussi, avec un joueur évoluant au Poiré-sur-Vie) .

L'autre, André-Pierre Gignac a 21 ans, il a été formé à Lorient et Christian Gourcuff fondait de gros espoirs sur lui avant qu'il ne soit sérieusement blessé à un genou. Pour lui permettre de mieux se rétablir en bénéficiant d'un temps de jeu conséquent, les Merlus l'avaient prêté à Pau, la saison dernière, en National. De retour en Morbihan, il avait effectué des apparitions intéressantes depuis le début de la saison et face à Nantes il avait été titularisé en L1 pour la première fois de sa carrière.

Tous deux garderont un souvenir indélébile de leur soirée de samedi au Moustoir. Le gardien du FC Nantes y a vécu un calvaire. Il avait des mains de verre et des gants qui glissaient. L'attaquant du FC Lorient a marqué trois buts. Il avait de la foudre dans les pieds et la réussite de son côté. « Sur le troisième, je voulais centrer, » confiait-il après coup. Lorient a peut-être trouvé en son sein l'attaquant qu'il s'apprêtait à acheter à l'étranger et va-t-il s'épargner de commettre une erreur dans le genre : aller acheter un Oliech quand on possède aussi bon chez soi (au fait : le « prodige » Keserü, on joue sa carte quand ? Dans dix ans ?).

On veut croire que pour Stojkovic c'est un accident

On n'aime guère imputer la responsabilité d'une défaite à un seul joueur et il est sans doute cruel de laisser Vladimir Stojkovic porter le chapeau du naufrage nantais. Il y a eu, hélas, de nombreux autres manques. Il n'empêche que sa culpabilité est énorme et on veut se persuader qu'il n'a pas joué sur sa valeur. Qu'il a connu un off-day, comme cela peut arriver, mais qu'il se reprendra très vite. Dans le cas contraire, ce ne serait pas seulement préoccupant : ce serait dramatique. Car même en sachant que la succession de Mickaël Landreau sera lourde à assumer, on ne pourra pas voyager longtemps avec un dernier rempart aussi friable. On espère que les techniciens qui l'ont supervisé l'ont observé suffisamment de fois pour avoir bien perçu ses qualités, mais également ses lacunes. Les coups francs ne sont apparemment pas sa spécialité. Certes, celui que lui infligea Gignac dès la 2è minute était magnifiquement tiré. Mais c'est la deuxième fois en quatre matches que Stojkovic encaisse un but de ce genre, puisqu'il avait déjà connu une mésaventure du même ordre à Nice.

Jamais un gardien extérieur n'a réussi

Alors est-il adroit dans cet exercice et sait-il placer un mur ? Les techniciens nantais l'avaient-il vu à l'œuvre sur coups francs ? Se sont-ils renseignés ? Et les dirigeants, de leur côté, ont-ils, avant de les expédier en Serbie, relu l'histoire de leur club qui nous dit que jamais un gardien venu de l'extérieur ne s'est imposé dans la cage des Canaris ? Il s'agit peut-être d'un hasard (quoique) et d'un fait qui ne demande qu'à être démenti. Pourtant, à ce qu'il nous semble, le départ de Landreau était plus ou moins dans l'air depuis quelques saisons. Alors, il est tout de même incroyable qu'on n'ait pas songé localement à sa succession.

Ce n'était pas non plus la peine que Rudi Roussillon impose à Mickaël une réponse avant fin mars si c'était pour embaucher un gardien de troisième zone. Mais répétons-le : on veut croire que Stojkovic vaut mieux, beaucoup mieux que ce qu'il a montré à Lorient et que l'ancien gardien qu'est le président du FC Nantes ne s'est pas trompé sur son compte.

Cetto autre maillon faible

Le problème maintenant est que Stojkovic, s'il possède des qualités, va devoir reprendre confiance. Confiance, voilà le mot est lâché et on nous l'a servi copieusement à l'heure des commentaires. Confiance ! Mais est-il normal de ne plus être en confiance alors que quatre matches seulement ont été disputés ? Les Nantais sont-ils si fragiles ? Leur impose-t-on une si grande pression ? « On veut des joueurs de caractère, c'est ce qui manque, » avait dit Japhet N'Doram.

Nous, on préfère mettre le talent en exergue, d'autant qu'on n'a pas vraiment senti le vent de la rébellion pousser les Nantais aux fesses sur la pelouse du vieux et inconfortable Moustoir. Il est vrai qu'ils y ont encaissé leur premier but dès la 2è minute. Et cela nous amène à parler tout de suite d'un autre maillon faible de la défense : Mauro Cetto. C'est l'Argentin en effet qui s'était rendu coupable de la faute sur Gignac, provoquant le coup franc qui permit au canonnier merlu de faire mouche. En prime, Cetto écopa d'un carton jaune, il allait le payer plus tard.

Belle égalisation de Da Rocha

En fait, très vite, c'est toute la défense nantaise qui donna de la bande devant un Stojkovic scotché sur sa ligne et à chaque fois que les Lorientais renversaient le jeu il y avait danger. Les Canaris manquaient de mobilité, de lucidité, de synchronisme. Ils se plaçaient mal (à la 6è minute, Gignac se retrouva complètement seul pour une reprise de la tête qui fila à côté), avaient besoin d'une heure pour se retourner, ne voyaient pas les coups arriver et ils commettaient trop de fautes. Nantes parvint pourtant bel et bien à égaliser, dès la 12è minute. Et ce fut logique car sous l'impulsion de Wilhelmsson (à droite), Da Rocha (à gauche) et surtout Rossi (en soutien du coureur à pied Oliech), il essayait de jouer au football. Le but des Canaris fut même très bien amené : Wilhelmsson donna le ballon sur la droite à Rossi qui leva la tête et centra pour Oliech, lequel prolongea sur Da Rocha dont la reprise du crâne fit mouche. Oui, c'était bien joué. On écrirait même que ce fut superbe si on était certain qu'Oliech fit exprès de mettre Da Rocha dans une position idéale et que sa déviation d'un genou ne fut pas involontaire…

Lorient s'envole

Nantes était donc revenu dans la partie. Malheureusement il la quitta presque aussitôt et cette fois de façon quasi-définitive. Guère plus de deux minutes après le but de Da Rocha, Moullec lança Gignac entre Cetto et Guillon, pris à revers. L'attaquant lorientais s'avança et décocha un shoot croisé à ras-de-terre qui était tout, sauf violent. Le gardien nantais se coucha et laissa échapper le ballon dans sa cage. « Il avait mis ses gants en peu de pêche,» dira Gignac.

Stojkovic mesure 1,95 mètre et il n'est guère surprenant que les interventions au sol ne constituent pas son point fort. L'ennui est qu'il encaissa le troisième but en se faisant lober. On atteignait alors la 27è minute et Nantes éprouvait du mal à réagir et plus encore à construire. Ses relances défensives, notamment celles de Cetto, étaient des modèles de ce qu'il ne faut pas faire. Ewolo balança alors un ballon sur l'aile gauche où Savinaud brillait par son absence. Gignac, lui, était bien présent et quand Mauro Cetto voulut s'interposer il se joua de lui comme d'un pantin. Il l'embarqua d'un côté, revint de l'autre et décocha un shoot lobé qui mystifia le gardien des Canaris. Le ballon ricocha sur le deuxième poteau et fit frissonner les filets.

Cetto dehors

Cette fois, Nantes était KO, à l'image de Loïc Guillon qui ne se releva pas après un contact aérien avec le coude de Ciani (32è). Il récupéra ses esprits, revint sur le terrain jusqu'au repos, mais à la reprise il laissa sa place à El Mourabet et son brassard de capitaine à Emerse Faé.

Signorino, qui jouait une nouvelle fois diminué et sans s'être entraîné, ne put dépasser pour sa part l'heure de jeu et il fut relayé par Capoue. Pour ce dernier, le poste d'arrière gauche ne relevait pas de la découverte (il l'avait déjà occupé en décembre dernier à Bordeaux), il reste que sa première intervention fut digne de Cetto : faute sur Saïfi et carton jaune.

Mauro Cetto, revenons à lui, avait toujours la fièvre. Dès le début du second acte, il avait frôlé le deuxième carton jaune. Il ne cessait pas de discutailler, d'invectiver, de provoquer. Serge Le Dizet lui demande souvent de faire preuve de davantage de modération. « Mais que puis-je faire ? Il n'a plus vingt ans ! » lâche-t-il. Oh non ! L'Argentin agit parfois comme s'il n'en n'avait pas la moitié et le coach nantais aurait pu le rappeler sur le banc prématurément. On n'est certes pas sûr que la leçon aurait porté, elle aurait toutefois eu le mérite de permettre à Nantes de terminer à 11. Un tacle irrégulier sur Gignac valut en effet à l'Argentin de rejoindre prématurément le vestiaire à la 77è minute.

Malaise pour Oliech

Cette péripétie, sorte de coup de pied de l'âne, amena le coach nantais à retarder de quelques instants l'entrée en jeu de Keserü qu'il s'apprêtait à réaliser. Savinaud glissa au centre de la défense et Da Rocha se replia sur le côté droit, si bien que la défense nantaise fut composé dans le dernier quart d'heure par Da Rocha, Savinaud, El Mourabet et Capoue. C'était plutôt de l'inédit.

Le Roumains pénétra enfin sur la pelouse à la 83è minute, juste avant qu'Oliech ne soit victime d'un mystérieux malaise. Nantes se retrouva ainsi à 9 joueurs. Le Kenyan revint pourtant achever un match qui traînait terriblement et tristement (pour les Canaris) en longueur. La seconde période fut en effet du genre soporifique. Les Lorientais vivaient tranquillement sur leur avance et jamais les Canaris ne semblèrent en mesure de résorber leur retard, malgré quelques tentatives de Rossi (notamment à la 58è minute). C'est tout juste si on nota un tir lointain et foireux d'Oliech, à la 66è minute. Le Kenyan n'avait pas vu Wilhelmsson, mieux placé, et pour tenter sa chance d'une telle distance il devait encore se croire dans le très redoutable championnat du Qatar.

B.V, le 28 août 2006.