La plus faible attaque de Ligue 1

Les idées de base des Nantais sont plutôt bonnes, ils ne parviennent pas à les exprimer dès lors que le jeu arrive à une trentaine de mètres de la cage adverse et que les mailles du pressing se resserrent. Alors tout se liquéfie. Ils se sont procurés une seule occasion de but à Félix-Bollaert. Leur attaque est l'une des deux plus faibles, avec Rennes, de toute la Ligue 1 : 11 buts en 14 matches. Quelle misère ! Les grands génies du football nantais doivent se retourner dans leur tombe ou éteindre leur récepteur quand le FCN passe à la télé. C'est trop triste. Trop bête.

Pas un seul Nantais ne serait titulaire à Lens

Georges Eo n'est à priori pas le plus coupable de ce gâchis. Comme Serge Le Dizet ne l'était pas de celui qu'il a enclenché. Par rapport à son prédécesseur, le coach nantais essaie même de redonner de la sérénité et de faire fi des querelles internes stériles. Il ne larmoie pas, « fallait pas recruter celui-ci », « fallait pas prendre celui-là ». Il a bien compris que c'est trop tard : il doit faire avec les joueurs dont il dispose. Et cet effectif, nous ne cessons hélas de le constater et de l'écrire est de qualité limitée. Il n'a rien à voir par exemple avec celui de Lens, à tel point qu'on peut se demander quel Canari aurait sa place aujourd'hui dans l'équipe Sang et Or. Déjà que Nicolas Gillet et Eric Carrière éprouvent de sérieuses difficultés à être titulaires de façon durable !

C'est de talents que les Canaris manquent le plus

Il nous coûte évidemment d'écrire ces lignes mais comment nier l'évidence : c'est de talents que Nantes manque le plus. Mais surtout, surtout que Rudi Roussillon ne croit pas qu'on l'invite à nous servir quelques nouvelles de ses petites merveilles au cours des prochaines périodes de transfert : sur ce plan, on a suffisamment constaté de quoi il est capable, huit joueurs en huit mois, du jamais vu à Nantes. Il est simplement dommage que son patron, le bon Monsieur Serge, ne l'invite pas à lui rendre des comptes. Sur le plan de sa compétence d'abord et pourquoi pas, aussi, sur celui des finances. Car enfin, des percherons achetés à prix de purs sangs, ça représente combien au niveau des pertes ?

L'affaire Stojkovic - Briant

Nantes, pour l'instant, a surtout besoin de stabilité, de solidarité car il va lui falloir ramer dur pour remonter les courants contraires. On peut penser aussi qu'il aurait pu faire l'économie de l'affaire Stojkovic – Briant qui a altéré la préparation du math à Lens. Si on a bien compris le détonateur en a été Milan Calasan, ancien joueur de D2 devenu imprésario. C'est un personnage très « recommandable », dont le nom revient de temps à autres dans des histoires de transferts obscures. La juge qui instruit l'enquête sur les transactions présumées irrégulières du Paris SG lui a d'ailleurs signifié une petite mise en examen la semaine écoulée. Pour, entre autres, « faux et usage de faux ». Ce genre d'agents, un grand club, appellation qui sous-entend une certaine éthique, s'applique à les éviter (sauf si évidemment ils ont un gars comme Ronaldinho ou Eto'o dans leur écurie mais c'est relativement rare). Calasan est l'imprésario de Stojkovic et la semaine dernière, avant d'être mis en examen, il a alerté les dirigeants nantais sur l'intérêt que des clubs étrangers (ben voyons), un espagnol surtout, porteraient à son gardien protégé. Un président avisé lui aurait répondu : « Super vos offres, on a acheté Stojkovic 1,5 millions d'euros, demandez aux clubs concernés de rajouter quelques milliers d'euros et on va pouvoir entamer la discussion.» Au lieu de ça, Roussillon et Gripond ont rétorqué qu'ils veulent absolument conserver leur prodige. Là-dessus, la machine à hypothèses multiples s'est enclenchée et elle a conduit plusieurs journaux à prévoir la titularisation de Stojkovic dans leurs éditions de samedi matin. On peut imaginer que pour mettre un gardien en confiance il existe de meilleures recettes. Et là, voyez-vous, on pense à Vincent Briant. Ce n'est bien sûr pas les médias que l'on met en cause, il n'entre pas dans leur rôle de s'occuper des états d'âme des joueurs, mais bien ceux qui ont laissé l'indécision prendre corps. Vincent Briant ne s'était certes pas montré impérial face à Saint-Etienne, notamment sur le premier but, il n'a pas non plus vraiment démérité depuis qu'il est titulaire et, surtout, il évolue à un poste où un joueur a davantage besoin de certitudes que d'interrogations. Ce n'est pas en changeant de gardien à chaque match que l'on résoudra le problème de la succession de Landreau. Le plus navrant dans cette histoire, mais on a déjà eu l'occasion de l'écrire, étant que le club n'ait pas su préparer la solution en son sein, quand il en avait le temps.

Record : le but le plus rapide de la saison

Si on a parlé aussi longtemps de Vincent Briant et du facteur-confiance c'est évidemment parce qu'à Félix-Bollaert le premier but est arrivé vite. Beaucoup trop vite. Au départ, Norbert, titularisé sur le flanc gauche, commit une faute sur Demont. Le coup franc fut botté par ce dernier, Cousin prolongea le ballon de la tête jusqu'à Hilton, étrangement seul au second poteau. L'Uruguayen reprit de la tête, Briant se détendit sans parvenir à maîtriser le ballon et Coulibaly surgit pour trouver le chemin des filets. Les défenseurs nantais n'y avaient vu que du bleu, leur gardien n'était pas parvenu à les sauver. La partie était entamée depuis 44 secondes et c'était le but le plus rapidement marqué cette saison en Ligue 1.

Il est des circonstance où il vaudrait mieux ne pas figurer dans les livres des records. Les Nantais accusèrent le coup. Si bien, ou si mal, que sur un nouveau coup-franc, provoqué par Saïdou (carton jaune en prime) et encore tiré par Demont, les Lensois mystifièrent encore l'arrière garde nantaise et Cousin se retrouva en tête à tête avec Briant. Le gardien prit le dessus (12è). Ouf !

L'occasion de Diallo

Les Canaris sortirent pourtant peu à peu le bec de l'eau, ils firent courir le ballon, ils s'assurèrent même une certaine domination et ils permirent de croire que le scénario n'était pas forcément écrit de manière définitive. Il eut d'ailleurs été peut-être différent si à la 28è minute, alors qu'il se présenta seul devant Itandje, Mamadou Diallo était parvenu à marquer. Il tenta sa chance de la tête, le gardien lensois s'interposa de façon limite et repoussa le ballon sur Rossi qui le transmit à Wilhelmsson. Le Suédois, estimant sans doute ses possibilité de conclure trop réduites, préféra redonner à Rossi qui tenta enfin sa chance. Las, le tir fut contré et il n'obtint qu'un corner. Le tout s'était déroulé dans la surface de réparation.

On approchait de la demi-heure de jeu et Nantes se portait donc mieux, même si en milieu de terrain Faé et Saidou, ni l'un ni l'autre dans un grand soir, éprouvaient quelque peine à soutenir la cadence avec Nenad Kovacevic un joueur que, voyez-vous ça, Lens est allé chercher en Serbie. Il s'est imposé d'entrée. « On traversait une période laborieuse quand il a effectué son premier match et son apport s'est tout de suite révélé bénéfique, raconte Francis Gillot. Il a largement contribué à nous remettre à flots.» Sacré football qui nous dit ainsi qu'en Serbie, mince alors, il existe des bons joueurs ! Même que si ça se trouve, on n'a pas vérifié, l'imprésario de Kovacevic est Milan Calasan. Lequel se trouvait d'ailleurs à Félix-Bollaert, en compagnie de l'un des ses anciens poulains, ayant le mieux contribué à bâtir sa fortune, un certain Christian Karembeu.

Poudre éventée

L'ennui est que cette première occasion de but fut aussi la seule. Nantes avait esquissé une tentative de rébellion, il en resta là et en fin de première période Mauro Cetto, le meilleur Canari de la soirée, effectua deux sauvetages, le premier sur un centre de Carrière, le second sur un centre de Demont, à chaque fois venu de la droite, le deuxième étant consécutif à une perte de balle de Faé.

Mamadou Diallo n'était pas très en jambes, peut-être parce qu'il avait joué en sélection trois jours plus tôt. Alors, Claudio Keserü, masque vissé sur le visage, le remplaça à la 56è minute. Le comble est qu'à plusieurs reprises ses coéquipiers lui adressèrent des ballons aériens. Cetto commit l'une de ses rares erreurs de la soirée face à Thomert qui en profita pour aller se présenter seul devant Briant. Il réussit à tirer à côté (58è). Le gardien nantais sauva la situation six minutes plus tard face au même Thomert puis Eo lança ses dernières cartouches en remplaçant Norbert par Da Rocha (67è) et Wilhelmsson par Boukhari (71è). Mais la poudre des Canaris était éventée et ces changements ne modifièrent pas le cours des événements.

Deux joueurs formés à Nantes au départ

Nantes ne parvenait pas à se défaire du pressing imposé par des Lensois très combatifs, très groupés et prompts à boucler le porteur du ballon. Alors, il ne développait pas beaucoup de jeu, il n'était absolument pas dangereux. Boukhari était aussi transparent que Wilhelmsson, Rossi baissait de plus en plus de pied et il aurait fallu un coup de chance pour égaliser. Le drame est qu'aucun joueur ne possède suffisamment de classe pour trouver une solution individuelle et la technique faisait défaut pour permettre de s'en sortir collectivement. Jouer vite, à terre, à une touche de balle, en mouvements, c'est facile à dire, difficile à faire quand on n'a pas été élevé dans le vivier canari et lorsqu'on ne possède pas une maîtrise gestuelle minimale. Dans l'équipe de départ, il n'y avait que deux joueurs, Briant et Faé, issus de la Jonelière, quel échec pour un club qui se dit formateur, quelle honte pour Messieurs Roussillon et Gripond !

Coup de grâce

Le coup de grâce survint à huit minutes de la fin. De nouveau sur un coup de pied arrêté, ce qui traduit quand même d'inquiétantes lacunes en ce domaine. Mauro Cetto, dont on a dit du bien, commit une faute pas forcément indispensable sur Carrière. Seydou Keita ajusta alors un coup franc que Jean-Jacques Pierre eut la malchance ou la maladresse de dévier. Vincent Briant, pris à contre-pied, ne put que constater la casse.

B.V, le 20 novembre 2006.